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Croix-Rouge de Belgique
25.03.2017 |

Bruxelles: « Le plus dur est d'être confronté à la détresse des gens »

Bruxelles: « Le plus dur est d'être confronté à la détresse des gens »

Bruxelles: « Le plus dur est d’être confronté à la détresse des gens ».

Témoignage d’Emmanuel, volontaire Croix-Rouge.

Emmanuel, Yves, Meo, Myriam, Colette, Violette, Philippe, Mélanie, Anne-Claire… Ce sont quelques-uns de nos volontaires de l’ombre, actuellement à l’œuvre pour soigner les blessures « invisibles » des victimes.  Si les secouristes de la Croix-Rouge ont été en première ligne pour soigner les nombreux blessés des attentats, Emmanuel et son équipe ont été mobilisés dans la foulée. Ils font partie du SISU, le service d’intervention psychologique d’urgence. Dès l’ouverture, mardi, du call-center de crise, au 1771, ils étaient présents pour répondre aux appels angoissés des familles et proches des victimes.

« Nous nous efforcions de répondre avec des mots très simples, de montrer le plus d’empathie possible, d’être à l’écoute »

« Le jour des attentats, j’étais au call-center de 18 à 23h », se souvient Emmanuel, qui, dans la vie est assistant social. « Le téléphone sonnait non-stop, toutes les 30 secondes, nous ressentions en direct l’inquiétude des appelants. Nous avions nous-mêmes fort peu d’information et devions répondre à des personnes qui savaient qu’un ami, un parent, un collègue, était à Zaventem ou dans le métro. Ils n’avaient plus de nouvelles, le GSM sonnait dans le vide…  Nous avions aussi en ligne des ambassades, des universités étrangères dont les étudiants sont en Erasmus… Tous les appelants étaient très dignes, très polis, alors que nous n’avions pas beaucoup d’information à leur donner. Nous nous efforcions toutefois de répondre avec des mots très simples, de montrer le plus d’empathie possible, d’être à l’écoute. Nous devions laisser à ces personnes le temps de dire les choses, et leur expliquer qu’elles pouvaient nous rappeler quand elles le souhaitaient ».

La mission suivante fut plus éprouvante encore pour Emmanuel, volontaire aguerri, qui fit déjà face à la catastrophe ferroviaire de Pécrot, voici quelques années. « A 23h, jusque dans la nuit, j’étais mobilisé à l’hôpital militaire où un centre d’accueil avait été installé pour les proches ».

Dès 10h le mercredi, après seulement quelques heures de sommeil, Emmanuel est de retour à l’hôpital pour coordonner l’activité de ce centre d’accueil, en collaboration étroite avec les spécialistes de la police, chargés de l’identification des victimes décédées. « Dans ce centre d’accueil, nous nous sommes retrouvés entre volontaires aguerris. Car c’est un accompagnement beaucoup plus dur qui commence. Les familles que nous accueillons ne savent pas encore si leur proche est parmi les victimes et les questions que les services d’identification leur posent  sont difficiles pour eux : on évoque des tatouages, des cicatrices, la couleur des vêtements portés ce jour-là… J’ai croisé environ 15 familles des victimes du métro. J’ai géré ce centre d’accueil jusque 20h. Ce jour-là, le Roi et la Reine sont venus pour une visite que j’ai encadrée. De nouveau ce fut le choc pour les familles car le service d’identification de la police a été présenté au Roi, les spécialistes ont expliqué leur travail sur les corps. Ce fut à nouveau difficile à entendre pour les proches. Nous nous sommes efforcés de les rassurer le mieux possible. L’encadrement sera encore plus important quand les proches feront face aux victimes, certaines gravement blessées, souffrant de blessures de guerre, d’autres hélas décédées : nous devons les préparer à faire face, en même temps que nous tenter de les maintenir dans un cocon, en les tenant à l’écart des médias pour que l’attente de nouvelles soit moins pénible. »

Emmanuel, volontaire depuis dix ans au sein de l’équipe d’intervention psychologique d’urgence, a, comme ses collègues d’intervention, été libéré par un employeur compréhensif pour remplir sa mission Croix-Rouge. « Le plus dur est d’être confronté à la détresse des gens. Après avoir répondu au call-center, j’ai pu mettre un visage sur les familles, les victimes. J’étais face à une toute autre réalité de la catastrophe. C’est dur de se dire que des personnes qui sont parties le matin en disant au revoir à leurs proches ne reviendront plus. Par moment, nous-mêmes nous devons prendre du recul. C’est alors que je dis aux volontaires avec qui je travaille : sortez, allez prendre l’air, allez boire quelque chose, videz vous l’esprit, soufflez ».

De mardi à ce vendredi, le service d’intervention psychologique d’urgence de la Croix-Rouge avait déjà mobilisé plus d’une quarantaine d’intervenants différents. Ils seront encore mobilisés dans les prochains jours et se relaieront durant tout ce week-end.

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